Réconciliation : Le projet « Women on the frontline » (Des femmes sur la ligne de front)

L’Église anglicane, où qu’elle soit dans le monde, prend à cœur les questions de réconciliation et de rétablissement de la paix. Les chefs et les membres des églises œuvrent avec dévouement au service d’une vie en paix entre communautés, ainsi qu’au soutien des victimes de conflits partout dans le monde. Ce « dévouement en action » est une façon de témoigner concrètement de l’amour de Dieu pour le monde.

Un projet international ayant pour ambition de mettre à profit les talents de conciliation que possèdent des femmes vivant dans des zones de conflit ou sortant de conflit. Ce projet a eu une incidence considérable sur la réconciliation des communautés meurtries par la guerre dans le monde entier.

Ce projet dans sa dimension internationale, initié en 2016 par Caroline Welby, épouse de l’archevêque de Cantorbéry, était mené en collaboration avec des femmes se trouvant propulsées dans des fonctions de service public, souvent en lien avec les fonctions de leurs époux.

Parmi ces femmes, citons Jane Namurye, épouse d’Anthony Poggo, ex-évêque du diocèse de Kajo-Keji au Soudan du Sud. Jane et ses enfants vivent au palais de Lambeth, à Londres, depuis 2016, date à laquelle Anthony fut nommé conseiller de l’archevêque pour les affaires de la communion anglicane.

Forte d’une expérience directe de vie en zone de guerre dans son propre pays, le Sud-Soudan, Jane était l’un des fers de lance du projet « Women on the frontline » aux côtés de Caroline Welby. Elles ont mené des campagnes relevant de ce projet au Sud-Soudan, au Burundi, en République démocratique du Congo et dans les îles Salomon.

Jane raconte : « J’ai vécu moi-même ce qui s’est passé lors du conflit au Soudan du Sud en 2013. Les débuts de la crise à Juba étaient traumatisants pour les dirigeants de l’Église, y compris les évêques. » Elle ajoute qu’une année plus tard, la commission Justice, paix et réconciliation, à laquelle elle était rattachée en tant que membre de l’Église épiscopale du Soudan du Sud, a fait voyager les évêques au Rwanda pour une période de retraite, où ils ont reçu le soutien de membres du clergé qui étaient bien conscients de ce que c’était que de vivre au milieu de la violence et des conflits.

Elle a également souligné que dans bien des régions de la Communion anglicane, les épouses des évêques et des membres du clergé œuvrent pour la paix, et qu’elles ont le don de répercuter les principes du rétablissement de la paix aux communautés locales. Elle dit penser que les femmes ressentent la montée des tensions et qu’elles sont bien souvent capables de désamorcer les conflits.

Selon Jane, les épouses de dirigeants religieux se retrouvent parfois propulsées dans des fonctions publiques sans aucune initiation ni aptitude nécessaires pour vivre leur nouvelle vocation avec confiance. L’initiative « Women on the Frontline » a justement pour but de rassembler des femmes pour des journées de retraite, suivies de quelques journées de formation à la réconciliation, à la promotion de la paix et à la gestion des situations de crise.

Chaque pays a ses particularités, mais la finalité est de former les femmes et de les soutenir dans leur rôle d’artisanes de la paix. Dans certains pays, les femmes qui ont participé aux retraites de formation ont pu par la suite réunir d’autres femmes dans des ateliers qu’elles ont animés dans le but de guérir des relations tendues, tandis que d’autres ont profité de leurs compétences pour reconstituer des familles en rupture.

Lors de leur première visite au Soudan du Sud en 2017, Caroline et Jane se sont entretenues avec des épouses d’évêques, des clergés et des responsables de la Mothers’ Union, qui avaient tous été happés par des conflits.

Jane ajoute : « La phase de retraite est d’une grande importance, car elle offre aux femmes le sentiment que Dieu les a appelées à être ce qu’elles sont et qu’elles sont aimées de Dieu. Certaines d’entre elles sont perçues comme étant privilégiées en tant qu’épouses de leaders, mais en réalité elles vivent souvent dans l’isolement et sont aux prises avec bien des difficultés. »

Selon elle, beaucoup des femmes qu’elles ont rencontrées étaient victimes de différents traumatismes, étaient éreintées et souffraient de pauvreté extrême. Elles ont également rencontré beaucoup de femmes déplacées, victimes de violences et de traumatismes.

À la suite d’une deuxième visite au Soudan du Sud en 2018, Jane dit avoir appris que l’une des principales membres de la Mothers’ Union était devenue une coordinatrice des activités de réconciliation et qu’elle était allée au Rwanda pour suivre une formation complémentaire. Elle aide, depuis, d’autres femmes victimes de traumatismes, en les faisant reprendre confiance en elles-mêmes et en animant des ateliers pour d’autres.

« Cela permet aux femmes de tendre la main à celles qui n’ont pas eu la possibilité d’avoir la parole, leur permettant ainsi de devenir elles-mêmes des faiseuses de paix », déclare Jane.

La vision du projet « Women on the Frontline » est de repérer et soutenir des femmes d’Église vivant dans des zones de conflit ou sortant de conflit, et de leur conférer les compétences nécessaires pour devenir des ambassadrices de la réconciliation, afin de favoriser la réconciliation au niveau des communautés.

Le partenariat avec les églises locales est un élément clé du processus, lequel permet également de garantir la viabilité du programme et son adéquation avec les réalités culturelles locales.

Le projet « Women on the Frontline » agit en réponse à l’invitation du primat de la province anglicane et a lieu généralement à l’occasion d’événements où les femmes sont déjà réunies, comme les réunions annuelles de la Chambre des évêques. Les visites ont pour but de rassembler les épouses d’évêques et les femmes pour leur offrir accueil, nourriture spirituelle et repos.

Jane dit qu’elle tenait beaucoup à apprendre des expériences des autres en matière de réconciliation. Elle ajoute que le Conseil des Églises du Soudan du Sud (SSCC, pour South Sudan Council of Churches) a su apprendre de l’Église du Rwanda comment elle a pu renouer les liens et réconcilier les communautés à la suite du génocide de 1994. Elle s’est exprimée ainsi : « Lors d’une réunion du SSCC en 2015, les trois piliers du plaidoyer, le forum de neutralité, la réconciliation et maintenant le renforcement institutionnel, ont été mis en place et sont désormais désignés par le conseil comme un « Plan d’action pour la paix ». »

Selon Jane, le projet « Women on the Frontline » donne aux femmes une occasion de contribuer aux efforts de paix et à la prise de décision. Elle ajoute : « Dans les situations de conflit, ce sont les femmes et leurs enfants qui endurent les souffrances, c’est donc elles qui devraient être les plus à même d’apporter la paix. »

On espère qu’il y aura d’autres programmes de même vocation dans d’autres pays au cours des années à venir.

Fin

Légendes des photos :

1. Des évêques du Sud-Soudan et leurs épouses lors de la retraite et de la formation « Women on the frontline ».
2. Caroline Welby, deuxième à gauche, avec des femmes participant au projet « Women on the Frontline » au Sud-Soudan.
3. Atelier « Women on the frontline » au Sud-Soudan.

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